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In Nomine Domini

In Nomine Domini

« Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » (Jean XVIII. 37)


Un contradicteur

Publié par Jean-Baptiste sur 24 Août 2016, 17:50pm

J'ai récemment reçu un mail d'un survivantiste qui s'oppose à ma thèse selon laquelle la Fraternité Saint Pie X incarne l'Église visible, en bénéficiant d'une juridiction conférée par Paul VI.

L'objection principale de mon contradicteur est que la Fraternité Saint Pie X reconnaîtrait Bergoglio comme pape... Or il est facile de prouver que non, et si l'intéressé prétend que ce fut déjà le cas de Wojtyla (c'est-à-dire qu'il ait été selon lui reconnu par la Fraternité) alors il est également facile de prouver que son opinion est incompatible avec l'idée de la survie de Paul VI...

Comme je l'ai expliqué dans mon ouvrage ("La survie de Paul VI : une certitude de foi"), pour qu'un pape soit réellement reconnu, il faut qu'il le soit à la fois en théorie et en pratique, et non pas seulement de nom. C'est Van Noort lui-même qui l'écrit, dans sa Théologie dogmatique (1957) :

"On doit, par exemple, donner pleine adhésion à la proposition suivante : 'Pie XII est le légitime successeur de St. Pierre' ; de la même manière (et d'ailleurs si l'aspect suivant est une chose formellement révélée ce sera un dogme de foi) on doit donner pleine adhésion à cette proposition : 'Pie XII possède la primauté sur toute l'Église'. Car, sans évoquer la question de savoir à partir de quel moment il est prouvé que cette personne a été légitimement élue pour prendre la place de St. Pierre, lorsque quelqu'un a constamment agit comme pape et a été reconnu comme tel en théorie et en pratique par les évêques et par l'Église universelle, il est clair que le magistère ordinaire et universel donne un témoignage absolument clair de la légitimité de sa succession".

 

En vérité, la Fraternité Saint Pie X ne reconnaît pas réellement Bergoglio comme pape (et l'abbé Ricossa par exemple l'admet sans difficultés), car elle ne lui obéit pas. Elle fonde des séminaires à part, elle a un fonctionnement indépendant, elle dénonce l'enseignement de Bergoglio (ce qui lui vaudrait l'excommunication si c'était un pape légitime), elle célèbre une liturgie qui n'est pas le rite ordinaire de l'Église moderniste, elle se réfère à l'ancien code de droit canon, elle ne reconnaît pas tous les prétendus "saints" que le Vatican "canonise",etc. Si la Fraternité Saint Pie X reconnaissait véritablement Bergoglio comme pape, on ne parlerait pas de pourparlers en vue du "ralliement" de la Fraternité ! Si tel était le cas, ce ralliement ne serait plus à faire ! Pour toutes ces raisons, il faut être un piètre théologien pour dire que la Fraternité reconnaît réellement Bergoglio comme pape...

Mais j'irai même plus loin : si la Fraternité avait reconnu comme papes tous les prétendus "successeurs" de Paul VI (depuis Wojtyla), alors on pourrait dire avec certitude que Paul VI n'est plus vivant (ce qui prouve qu'une telle chose est impossible) : car si Wojtyla avait été accepté pacifiquement et universellement par l'Église, alors cela signifierait qu'il était infailliblement légitime, et donc que Paul VI serait infailliblement mort (ou aurait publiquement abdiqué sa charge) ! En effet, lorsqu'un pape a été validement élu (lors d'un conclave régulier), son élection fait obstacle à la reconnaissance pacifique et universelle de tout autre élu ; donc si Wojtyla avait été accepté pacifiquement et universellement, cela aurait démontré qu'au moment de son élection, il n'y avait plus de pape vivant en exercice (et donc que le Pape Paul VI était mort).

MAIS précisément, TEL NE FUT PAS LE CAS (à savoir que Wojtyla ne fut pas reconnu pacifiquement et universellement) : et c'est cette considération qui constitue la clé pour comprendre toute la crise de l'Église. Habituellement, dans l'histoire ecclésiastique, on ne déterminait pas la légitimité d'un pape en fonction de sa doctrine (comme le font les sédévacantistes par leur libre examen), partant que nul n'est habilité à évaluer lui-même la conformité de l'enseignement du pape au magistère antérieur. On déterminait la légitimité du pape (lorsqu'il faisait face à un schisme) en fonction de son acceptation pacifique et universelle. Pour exemple, Urbain VI lors du grand schisme d'occident fut reconnu par toute l'Église pendant six mois avant l'intervention du schisme ; ce qui était suffisant pour manifester infailliblement sa légitimité. TOUS les papes légitimes ont été reconnus pacifiquement et universellement (sauf ceux qui ont régné très peu de temps) ; et donc tous les prétendants à la papauté qui ne l'ont pas été sont des ANTIPAPES, purement et simplement. C'est pourquoi la reconnaissance pacifique et universelle de Paul VI, dernier pape ainsi reconnu, est le signe infaillible de sa survie (en vertu de la perpétuité de la succession épiscopale sur le Siège de Pierre). Après lui, les troubles liés à la nouvelle messe ont divisé le monde catholique et Wojtyla et ses successeurs n'ont donc pas joui d'une reconnaissance pacifique et universelle ; au contraire, au début de l'élection de Jean XXIII et de Paul VI, TOUTE la chrétienté les reconnaissait comme papes (j'ai vu même des sédévacantistes américains l'avouer sur des forums).

Un jour, au moment où Ratzinger était toujours l'antipape officiel du Vatican, je suis tombé sur un commentaire du site "Paul VI Pape Martyr" où mon actuel contradicteur affirmait que si jamais Paul VI n'était pas vivant, "Benoît XVI" était le pape légitime de l'Église catholique. (EDIT : L'intéressé dément en affirmant qu'il n'a jamais publié de commentaire sur ce site ; mais cela ne change rien car ses idées sont les mêmes en réalité). Or il s'agit d'une erreur, car si par impossible Paul VI était mort (ce qui contredirait la Constitution divine de l'Église), il n'en demeurerait pas moins que Ratzinger n'a jamais été accepté pacifiquement et universellement par l'Église (donc il n'a jamais été légitimement élu pape). En soi, le fait que mon contradicteur soit capable de commettre une erreur si grossière démontre qu'il ne maîtrise pas les questions de théologie dogmatique. Et pourtant il sait se montrer intelligent sur certains sujets. Mais son erreur n'est pas sans lien avec les erreurs (et hérésies) de son frère, qui écrit dans l'un de ses livres que Wojtyla a été accepté pacifiquement et universellement par l'Église (ce qui démontre qu'il n'a pas compris la notion d'acceptation pacifique).

En réalité Wojtyla n'a jamais été reconnu PACIFIQUEMENT, car la partie la plus saine de l'Église (les fidèles dits "traditionalistes") lui a désobéi, et ce dès le début de son élection (c'est le début du règne qui est déterminant, et une fois réalisée l'acceptation est irrévocable). Quant à Vatican II la Fraternité Saint Pie X a raison de dire que les conditions de l'infaillibilité n'étaient pas réunies, j'en ai déjà parlé. Par ailleurs tous les évêques du monde étaient rassemblés, donc l'hérésie au sens strict est exclue. Il ne faut ni nier ni exagérer le problème des enseignements erronés et ambigüs de Vatican II, qui est réel mais ne pouvait pas aller jusqu'à la négation de la Constitution divine de l'Église. Mgr Fenton, grand théologien anti-moderniste, est probablement celui qui a le mieux décrit l'attitude à suivre face à Vatican II : à savoir que les égarements du concile sont regrettables, mais que Dieu devait s'assurer que les erreurs en question ne soient pas enseignées infailliblement (sinon elles auraient été exclues). En d'autres termes Vatican II appartient à l'enseignement réformable (qui si l'on suivait les sédévacantistes, n'existe pas - ce que n'enseigne aucun manuel de théologie !).

J'ai suffisamment démontré ici pourquoi mon contradicteur se trompe, et pourquoi son opinion n'est pas compatible avec l'idée de la survie du Pape Paul VI. Mais j'ajouterais que selon lui, l'Église visible se perpétue dans l'Église moderniste ! Il se fonde sur le fait que le clergé moderniste n'est pas encore excommunié, son schisme n'étant donc pas notoire. Mais c'est insuffisant, car la société visible instituée par Notre-Seigneur ne doit pas seulement manifester négativement les critères de la véritable Église, mais également positivement. Et dans le cas de l'Église moderniste, son chef n'a pas été reconnu pacifiquement et universellement ; or les théologiens enseignent que de même que l'élu accepté pacifiquement et universellement ne peut être un antipape - sur le fondement que l'Église véritable ne peut errer -, de même il ne se peut pas faire - sur le même fondement - qu'une Église reconnaissant un faux chef soit l'Église véritable. Donc il est impossible que l'Église moderniste manifeste l'Église visible.

Mais, nous objecte notre contradicteur, "la Fraternité Saint Pie X ne reconnaît pas Paul VI comme pape". À cela nous répondons que Paul VI est le dernier pape accepté pacifiquement et universellement par la Fraternité Saint Pie X et ses fidèles, et même que c'est sous le règne de Paul VI que cette société a été constituée. Or, cette société est la seule - par sa hiérarchie, son étendue et son organisation - qui puisse répondre aux critères de la véritable Église. Donc il est certain qu'elle est l'incarnation de l'Église visible, bénéficiant de la juridiction du dernier pape légitime en vie et reconnu par elle, dont elle tient sa juridiction, sur la base de l'erreur commune. Malgré tous ses défauts, la Fraternité Saint Pie X est la préservation vivante de l'Église, ce que les exorcismes suisses ont d'ailleurs déclaré explicitement et à plusieurs reprises... C'est pourquoi, je l'ai déjà dit, je pense qu'elle ne se ralliera jamais (le retour de Paul VI interviendra avant) ; à mon sens cela paraît impossible.

 

Mon contradicteur m'accuse de "bricoler comme les sédévacantistes", mais s'il y en a qui bricolent, ce sont bien lui et son frère ; et en lisant cet article chacun pourra juger qui a tort et qui a raison.

 

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