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In Nomine Domini

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« Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » (Jean XVIII. 37)


Un pape peut-il sombrer dans l'hérésie ?

Publié par Jean-Baptiste sur 7 Octobre 2015, 07:36am

Un pape peut-il sombrer dans l'hérésie ?

La crise de l'Église a donné lieu à d'interminables débats sur cette question : un pape peut-il sombrer dans l'hérésie ? À vrai dire, on a disputé de cela depuis très longtemps, et même les définitions du concile Vatican I n'ont pu venir à bout de ces disputes (probablement parce que le concile n'a pu s'achever). Mgr Lefebvre disait, à juste raison, que cette hypothèse du "pape hérétique" donnait lieu à des questions insolubles ; et je suis bien d'accord avec lui.

Il me semble avoir amplement démontré que le sédévacantisme complet était contraire à doctrine catholique ; et que le guérardisme, lui, n'était possible que dans le cadre de l'hypothèse du "pape hérétique". Pour le réfuter, il suffit donc de prouver que cette hypothèse est à exclure (mais il existe encore d'autres voies, j'en ai parlé dans mon livre). Or, c'est assez facile.

 

Citons le Delineation of Roman Catholicism (1814), du Rev. Charles Elliott :

 

«En vérité, c'est la doctrine légitime de l'Église de Rome [que le pape ne peut sombrer, même en tant que docteur privé]. Ferraris, son écrivain ecclésiastique modèle, et Dens [Pierre Dens], défendent cette idée. Ce qui suit est l'explication de Ferraris : « Il est également vraisemblable que le pape, en tant que personne privée, ne peut sombrer dans l'hérésie, ou perdre la foi. Notre conclusion se prouve par les paroles du Christ à Pierre en Luc XXII [« J'ai prié pour que ta foi ne défaille pas ».] En effet, s'il est manifeste que Pierre a été confirmé par Dieu de telle sorte que sa foi, même en tant que personne, ne puisse défaillir en aucune manière, la même chose doit être dite de ses successeurs dans la papauté. Car un privilège leur a été accordé, de confirmer leurs frères dans la foi. Et comment les confirmeront-ils, s'ils sont hérétiques ou infidèles ? Confirmeront-ils chez les autres la foi qu'ils abhorrent ou qu'ils combattent ? Aussi, le Pape étant la règle vivante [de la foi], que tous les fidèles doivent suivre, et qu'ils doivent avoir devant leurs yeux, il est nécessaire de la fortifier par quelque privilège singulier, par lequel non seulement le siège lui-même, mais également sa personne, soit préservée de l'erreur dans ces choses qui sont de foi. Sinon, si l'on admet que le Pape lui-même peut sombrer dans l'hérésie et perdre la foi, peut-on s'attendre à autre chose qu'à ce qu'un aveugle conduise un aveugle, dans l'abîme ? »(...).

 

«Dens, sur ce point, argumente ainsi : « Le Pape peut-il, en tant que personne privée, être un hérétique ? - Réponse. Bien que l'affirmative ne serait pas contraire à la conclusion précédente [à savoir que le Pape peut errer en tant que personne privée], l'opinion négative semble plus probable, afin que le privilège de Pierre se transmette aux successeurs de Pierre ; et il est conforme à la providence de Dieu, que celui qui est le guide de notre foi ne puisse lui-même perdre la foi. Par là, on peut voir également qu'a priori, aucun pape n'a jamais été un hérétique formel : et Augustin en témoigne, dans sa 165e lettre, en ce qui concerne les papes jusqu'à son temps. Obj. « On dit du pape qu'il est juge de tous, et n'est jugé par personne, à moins d'être hérétique ; donc il peut être un hérétique formel ». - Réponse. Je nie la conclusion. Car on le dit seulement au cas où un pape perdrait la foi ; mais on suppose que cela n'est jamais arrivé et n'arrivera jamais ».

 

Ainsi, on voit bien par la dernière phrase de Dens que l'hypothèse du pape hérétique n'est qu'un cas d'école, et n'a été envisagée bien souvent qu'à titre spéculatif ; les sédévacantistes qui négligent de le rappeler font donc preuve de mauvaise foi (j'en ai connu un exemple). Le pape, en tant que docteur privé, peut errer, mais pas de manière pertinace : c'est-à-dire que si son entourage lui fait remarquer que son affirmation contredit la doctrine catholique, il ne s'obstinera pas ; et donc il ne sombrera pas dans l'hérésie formelle, dite "pertinace".

 

Il est normal que le privilège conféré à St. Pierre soit transmis à ses successeurs ; or, si vous prétendez que le pape peut sombrer, vous niez cette évidence. Pourtant, si le Christ a conféré ce privilège au prince des apôtres, c'est bien pour une raison : c'est pour qu'il puisse confirmer infailliblement la foi des fidèles ; et cette raison demeure jusqu'à aujourd'hui.

 

Ceux qui prétendent que le pape peut sombrer se heurtent à une difficulté : le pape ne peut être jugé par personne. Leur solution toute trouvée est la suivante : le concile qui adresserait des monitions canoniques au "pape hérétique" serait purement ministériel, et ne jugerait pas la personne du pape, mais seulement l'individu qui se prétend pape (d'autres disent que le concile jugerait du lien entre la matière et la forme du pontificat). Je terminerai mon article par cette belle réponse simple et chrétienne du théologien Almain, remplie de bon sens : "Cet argument relève de la chicanerie, et il est indéfendable ; il s'agit d'une défense pitoyable." (cit. in Delineation of Roman Catholicism,etc.) Un peu d'air frais !

 

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