Nous remercions vivement le dénommé Jean-Paul Bontemps (du forum foicatholique.cultureforum) de poursuivre cette controverse relative à l'infaillibilité du conclave ; grâce à lui le nombre de nos lecteurs augmente, et par là-même le nombre de ceux qui comprendront la vérité et seront acquis à notre cause.
L'intéressé s'étonne que je dise de l'abbé Ricossa (et de Mgr Guérard des Lauriers) que tous deux ont répandu des hérésies, car je ne suis qu'un laïc. En vérité, il s'agit là d'un pur argument d'autorité. Certains ouvrages sur la religion ont été écrits par des laïcs, et ils surpassent bien des livres écrits par des ecclésiastiques : voyez le cas par exemple de Jérôme Bignon, cité dans mon livre "La survie de Paul VI : une certitude de foi." J'ajouterais que Mgr Lefebvre, tout saint homme qu'il fût, a lui aussi répandu certaines hérésies (involontairement) : il prétendait que les fidèles devaient désobéir au pape pour conserver la foi ! Donc il est parfaitement possible qu'un prêtre ou qu'un évêque prononcent des hérésies.
Jean-Paul Bontemps avance que les faits dogmatiques n'entraînent pas l'adhésion des fidèles au même titre que les déclarations infaillibles du magistère ; ce qui est vrai dans le sens où comme le dit le théologien qu'il cite, la négation de la doctrine catholique en question est alors indirecte, et non pas directe ; mais le même théologien affirme qu'il s'agit d'un péché mortel, donc nécessairement d'une matière grave. Le R.P Francis Connell dit bien que l'élection du Pape est "une certitude de foi ecclésiastique" :
« Évidemment, nous avons une certitude humaine [quant à la légitimité de l'élu du conclave]. Ce type de certitude exclut toute crainte prudente du contraire [l'illégitimité de l'élu du conclave]. Mais dans le cas du pape, nous avons un plus haut degré de certitude – une certitude qui exclut non seulement la crainte prudente du contraire, mais même la possibilité de la crainte du contraire. En d'autres termes, nous avons une certitude infaillible... C'est un exemple de fait qui n'est pas contenu dans le dépôt de la Révélation, mais qui est si intimement lié à la Révélation qu'il doit être du ressort de l'autorité magistérielle de l'Église de le déclarer infailliblement. L'Église entière, enseignante et croyante, déclare et croit ce fait, et pour cela il s'ensuit que ce fait est infailliblement vrai. Nous l'acceptons de foi ecclésiastique (et non divine), suivant l'autorité de l'Église infaillible ».
(Ste Catherine de Sienne traitait d'hérétiques les cardinaux schismatiques qui avaient élu l'antipape Clément VII, parce qu'elle savait qu'un pape accepté par toute l'Église est nécessairement légitime, en vertu d'un fait dogmatique dont la négation est bien, indirectement, une hérésie).
Le même Jean-Paul Bontemps nous accuse de proclamer la supériorité du Concile sur le Pape, dans un paralogisme qui ferait pâlir un Sioux, et que je résumerais de la façon suivante :
-Jean-Baptiste fait dépendre l'infaillibilité pontificale de l'Église universelle [c'est faux, je dis juste que sans élection certaine, il n'y a pas de règle de foi certaine !] ;
-Or, l'Église universelle, c'est le Concile ! [il s'agit là davantage d'une course en VTT que d'un raisonnement logique !]
-Donc Jean-Baptiste fait dépendre l'infaillibilité pontificale du Concile ! Eurêkà, il défend l'hérésie conciliariste !
Heureusement que l'Église n'a pas eu trop d'inquisiteurs comme lui, sinon bien des corps auraient flambé indûment ! Cette argumentation, en termes de paralogisme et d'ineptie, est pire que celle de l'évêque Cauchon...
Dans le raisonnement susmentionné, tout est faux : les deux prémisses, et la conclusion ! C'est donc mal parti : nul ne fera de ce Jean-Paul Bontemps un brillant théologien.
D'abord, le fait de dire que sans élection certaine il n'y aurait pas de règle de foi certaine, ne revient pas à faire dépendre l'infaillibilité pontificale de l'infaillibilité de l'Église, du moins pas sous un rapport de cause à effet. Notre-Seigneur a voulu un pape infaillible parce qu'il a voulu une Église infaillible ; et en cela seul, on peut faire dépendre l'infaillibilité pontificale de celle de l'Église ; mais non pas sous un rapport de cause à effet qui postulerait que l'infaillibilité du pape est dépendante de celle de l'Église, par exemple en affirmant comme les gallicans que pour être infaillible, la doctrine du pape doit être reçue par tous les diocèses du monde.
Ensuite, il est abusif d'associer l'Église universelle et le Concile ; l'Église universelle inclut tous les fidèles, et non pas seulement l'Église enseignante. Cette association d'idées est totalement saugrenue : Jean-Paul Bontemps cherche par tous les moyens à nous attribuer des hérésies qui sont loin de notre pensée ; et s'il nous attribue à nous ces hérésies, il les attribue en même temps à tous les manuels de théologie qui enseignent la doctrine de l'infaillibilité de l'élection du Pape.
Jean-Paul Bontemps fait comme les enfants qui pour gagner un jeu, changent les règles de ce même jeu. Imaginons par exemple des enfants qui jouent à la guerre... La règle veut que le premier à avoir pointé son bout de bois l'emporte : l'autre est "mort". Mais l'un des protagonistes rétorque à celui qui l'a "tué" : "c'est même pas vrai, j'avais un gillet pare-balles !". En vérité, c'est exactement ce que fait notre ami : car les adultes commettent le même genre de péchés que les enfants.
J.-P. Bontemps lit dans tous les manuels de théologie sérieux que l'élection du Pape est un fait dogmatique (soit dit en passant, au début de notre controverse il le niait !), doctrine ainsi exprimée :
« On doit au moins tenir fermement, comme absolument inébranlable et hors de doute, ceci : l’adhésion de l’Église universelle est toujours à elle seule le signe infaillible de la légitimité de la personne du Pontife. »
(citation du Cardinal Billot, De Ecclesia Christi).
Mais le dénommé J.-P. Bontemps ne se contente pas de recevoir cette doctrine avec humilité ; il dit :
"Oui, l'acceptation pacifique est un signe certain de la légitimité du Pape, quand ce pape est catholique" ; et qui décide si le Pape est catholique ? C'est lui...
Ce que fait Jean-Paul Bontemps pour nier la doctrine de l'acceptation pacifique, les hérétiques l'ont fait avec d'autres doctrines de foi, par exemple la divinité du Christ, niée subtilement par les ariens. Or, la doctrine catholique est très claire ; le cardinal Billot, que nous venons de citer, et qui était l'un des plus grands théologiens du XIXe siècle, dit : "l'adhésion de l'Église universelle est toujours À ELLE SEULE le signe infaillible de la légitimité de la personne du Pontife."
Je ne suis peut-être qu'un petit laïc, mais sur ce point précis j'ai plus de rigueur que tous ces prêtres et évêques qui ont répandu l'hérésie par leurs thèses fausses et scandaleuses. J'ai un master de droit, et à la faculté, si nous manquions de précision dans nos cas pratiques ou dans nos commentaires d'arrêt, la note ne volait pas haut. Si j'avais commis les mêmes erreurs que celles de Mgr Guérard des Lauriers, je n'aurais pas dépassé le 4/20 ; je l'ai déjà dit et je le maintiens.
Je vais vous donner un exemple : la Bulle de Paul IV.
Lorsque je me suis intéressé à la question de cette Bulle (invoquée par les sédévacantistes contre la doctrine de l'acceptation pacifique), je me suis naturellement informé sur la nature de l'élection du Pape et sur la manière dont elle s'opère. J'ai lu alors le traité de Jérôme Bignon, et je suis tombé providentiellement sur l'ouvrage "La Rome éternelle", durant une foire aux livres qui avait lieu - ironie du sort - dans la ville natale du prêtre qui nous a chassés (mon frère et moi) de son prieuré. Dans cet ouvrage, une image décrit la cérémonie d'obédience des cardinaux sous le règne du Pape Pie XII ; cette cérémonie s'appelle "la prestation d'obéissance". Cette formule me disait quelque chose, elle me faisait penser à la Bulle de Paul IV. J'ai alors relu cette Bulle et j'ai trouvé la formule "prestation d'obéissance", en latin "praestitam ab omnibus obedientiam" (la prestation rendue à lui [au Pape] par tous) ; ce qui a confirmé mon analyse, à savoir que la Bulle ne parlait que des cardinaux, et non pas de toute l'Église : car il serait hérétique de dire qu'un antipape peut être accepté par toute l'Église ; et pourtant c'est le sens que prêtent les sédévacantistes à cette Bulle, tout simplement parce qu'ils n'ont pas de rigueur et ne se sont pas intéressés à la question du déroulement de l'élection du Pape...
D'une manière générale, il est stupéfiant de voir les erreurs théologiques que commettent les prêtres ou évêques traditionalistes qui se sont avisés d'évoquer la crise de l'Église dans différents ouvrages. Pour donner un autre exemple, les sédévacantistes ne comprennent rien à l'infaillibilité pontificale ; et le dénommé Jean-Paul Bontemps ne fait pas exception. Ce dernier continue de dire que le fait de reconnaître Jean XXIII et Paul VI comme papes entraîne une contradiction vis-à-vis de la doctrine catholique, à cause de Vatican II.
Nous répondrons donc, une énième fois :
-Que la condition la plus importante de l'infaillibilité pontificale est la détermination irrévocable d'un point de doctrine ; or Vatican II ne détermine irrévocablement aucun point de doctrine, ni sur le plan moral ni sur le plan de la foi.
-Que Paul VI lui-même a décrit Vatican II comme relevant du "magistère authentique", expression employée par les théologiens pour désigner le contenu non-infaillible du magistère. (Cette seule considération devrait clore toute discussion.)
-Que le magistère ordinaire et extraordinaire ne sont pas infaillibles dans l'intégralité de leur contenu, mais dans les seules parties déterminant une doctrine irrévocable ; donc, quand les sédévacantistes citent une autre phrase de Paul VI où il parle de "magistère ordinaire", ils montrent leur ignorance crasse quant à la distinction entre la forme de l'acte et son contenu : autrement dit ils partent du principe que le magistère ordinaire et extraordinaire sont intégralement infaillibles dans tout leur contenu, ce qui n'est absolument pas la doctrine catholique.
-Que la "liberté religieuse" condamnée par Quanta Cura ne correspond pas à la même notion que la "liberté religieuse" de Vatican II, car Quanta Cura parle d'une forme de liberté religieuse qui aurait pour seule exception la tranquillité publique, tandis que Vatican II parle d'une liberté religieuse qui a pour exception l'ORDRE PUBLIC ; or l'ordre public est une notion bien plus large que la tranquillité publique, car elle inclut l'ordre moral : ce qui signifie que la liberté religieuse dont parle Vatican II autorise des restrictions à l'encontre de toute secte qui porterait atteinte à l'ordre moral naturel et à l'ordre moral chrétien ; or, toutes les fausses religions leur portent atteinte. De surcroît, Paul VI a neutralisé l'interprétation hérétique de ce document en ajoutant un Préambule qui précise que les états ont le devoir de reconnaître la vraie religion. Il a également neutralisé l'interprétation hérétique du document sur le collège épiscopal en ajoutant une note préliminaire.
(ce qui ne veut pas dire que j'approuve Dignitatis Humanae, ni que Vatican II soit un concile bon et opportun !)
-Qu'un pape accepté pacifiquement par l'Église universelle est nécessairement catholique, et qu'il ne peut sombrer dans l'hérésie ("j'ai prié pour que ta foi ne défaille pas").
Si je n'avais pas fait de droit, je ne connaîtrais pas spécialement la différence entre tranquillité publique et ordre public ; et les prêtres qui n'en ont pas fait ne peuvent pas la connaître ! Or, il ne faut pas oublier que depuis la crise de l'Église, les prêtres traditionalistes sont formés dans des séminaires improvisés, qui n'ont pas le même niveau que les bons séminaires de jadis (si l'on excepte les séminaires modernistes, car il en a existé). C'est la raison pour laquelle, même en tant que simple laïc, on peut parfois avoir plus de rigueur que certains prêtres...
L'accusation la plus délirante de Jean-Paul Bontemps à mon encontre consiste à dire que je proclame la supériorité du concile sur le Pape (je vous renvoie au paralogisme évoqué plus haut). En lisant de telles choses, on voit qu'il n'a toujours pas compris la notion d'Église universelle ; alors comment prétendre entrer dans l'arène de la dispute théologique dans ces conditions ? L'Église universelle ne se résume pas au Concile général ; c'est une notion indépendante et plus large. Quant à l'infaillibilité de l'élection du Pape, il ne comprend pas que cette infaillibilité existe indépendamment du Pape lui-même ; elle existe per se et s'exerce sans lui : il s'agit d'une disposition de la providence, qui exclut qu'un conclave valide puisse jamais aboutir à l'élection d'un antipape, tout comme la providence exclut que toute l'Église enseignante puisse sombrer dans l'hérésie (cf. la condamnation des Vieux Catholiques par le Pape Pie IX).
Quand on montre aux sédévacantistes que l'Église enseignante ne peut disparaître (en citant Pie IX), ils disent : "l'Église moderniste ne peut pas être l'Église catholique" ; or ça n'est pas une réponse suffisante : car comme le reconnaît l'abbé Ricossa, encore s'agit-il d'expliquer comment l'Église est préservée aujourd'hui, dans ses caractères essentiels, en tant que Corps Mystique du Christ. AUCUN de ses attribus essentiels ne peut être altéré ! Ils ne souffrent AUCUNE altération, quelles que soient les circonstances. Or, l'abbé Ricossa et tous les guérardiens n'offrent pas de solution non plus, car ils prétendent que l'Église hiérarchique n'existe plus qu'à l'état de potentialité; ce qui contredit la doctrine catholique, qui enseigne que la visibilité de l'Église doit être à la fois matérielle et formelle, comme la succession apostolique.
Rappelons-le : le Pape transmet la juridiction ordinaire au corps épiscopal et au collège cardinalice, et à sa mort le collège cardinalice conserve la faculté élective ; il élit alors un pape, qui lui-même transmet la juridiction ordinaire au corps qu'il régit, et ainsi de suite. Si l'élection du pape était conditionnée par une disposition inconnue des fidèles, et si le recouvrement de la juridiction par un prétendu "pape matériel" était lui-même conditionné par la "conversion du pape", les fidèles devriendraient les juges de l'orthodoxie du magistère pontifical. Quel scandale, quelle hérésie ! Ce n'est plus le Pape qui confirme la foi des fidèles, mais les fidèles qui confirment la foi du Pape ! Voilà la thèse de Mgr Guérard des Lauriers !
Vous dites (je parle à nos adversaires) : "c'est le magistère qui nous enseigne que Jean XXIII et Paul VI sont hérétiques" ; mais nous venons de voir que c'est exactement le contraire. Car il n'appartient pas aux fidèles de juger de la conformité de l'enseignement du pape au magistère antérieur : on n'obéit pas au pape parce qu'on juge qu'il est catholique (suivant son libre examen) ; on lui obéit parce qu'il a été validement élu et accepté par toute l'Église, ce qui suppose nécessairement qu'il soit catholique. Mgr Fenton, grand théologien anti-moderniste américain, comprenait bien le problème de Vatican II, mais savait en même temps, invinciblement, que le Pape Paul VI était légitime : car il connaissait non seulement la doctrine de l'acceptation pacifique, mais celle de l'indéfectibilité de l'Église locale de Rome, la permance de la succession apostolique et de l'Église enseignante,etc.
Vous dites : "si le pape matériel se convertit", il recouvrera la juridiction ; mais qui juge s'il est catholique et s'est converti ? C'est vous ! En vérité, votre théorie, qui contredit la doctrine catholique, est une négation de la SÉCURITÉ de la succession apostolique ; car nul ne peut savoir si votre "pape matériel" s'est converti ou non.
Je vous donne un exemple des extrémités auxquelles peuvent parvenir les théories de ce genre (j'espère en parler prochainement dans une vidéo) : Mgr Sanborn, dans son ouvrage intitulé "La papauté matérielle", affirme qu'il suffirait qu'un seul cardinal moderniste se convertisse et émette des monitions canoniques contre l'antipape romain, pour que l'Église puisse élire un pape (en la personne de ce même cardinal) ! Autrement dit, les modernistes seraient plus compétents pour élire un pape ! Voilà le degré d'absurdité de vos théories...
OR IL NE S'AGIT PAS D'UN CAS D'ÉCOLE : récemment, le "patriarcat catholique byzantin" a prétendu anathématiser Jean XXIII et Paul VI ; et maintenant, qui sait justement si ces orgueilleux ne vont pas déclarer la vacance du Saint-Siège et prétendre élire Pape leur patriarche, après avoir convoqué un conclave invalide ? Et l'Église aurait un antipape de plus sur les bras...
MAIS C'EST EXACTEMENT CE QUE JEAN-PAUL BONTEMPS APPELLE DE SES VOEUX, dans ce message délirant :
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Les hommes ne savent qu'inventer...