Suite à mon article intitulé "Une hérésie sédévacantiste, sur l'Ecclesia docens", deux personnes (qui sur le fond étaient d'accord avec moi) m'ont adressé l'éternelle objection selon laquelle l'acceptation du pape est déjà universelle lorsque le seul épiscopat a adhéré au pape. L'un d'eux, qui n'est pas survivantiste, dit donc que l'idée de la survie de Paul VI conduit au même problème que le sédévacantisme, à savoir l'idée que l'Église enseignante aurrait erré.
En réalité, on me fait répéter cent fois les mêmes choses... J'ai déjà prouvé que l'acceptation pacifique devait être accomplie par toute l'Église, et pas seulement par les évêques : car le fondement de cette doctrine est que la tête ne peut pas se séparer du corps (et vice versa) ; or l'épiscopat fait partie de la tête : donc c'est l'acceptation de tout le peuple fidèle qui compte, en ce sens que l'Église enseignée ne peut se séparer intégralement (ou presque) de l'Église enseignante. Aucun de mes objecteurs n'a répondu à cet argument, que j'ai pourtant énoncé à plusieurs reprises ; et de fait, si l'on ne m'a pas répondu, c'est précisément par que cette considération constitue une pierre d'achoppement pour ceux qui continuent de me dire, contre vents et marées, qu'il suffit que l'acceptation pacifique soit accomplie par les évêques seuls. Par ailleurs, j'ai déjà expliqué également pourquoi, à mon avis, bon nombre d'évêques n'avaient pas adhéré à Wojtyla au moment de son élection.
L'Église enseigne que l'épiscopat est collectivement immunisé contre l'hérésie, et généralement les théologiens vont jusqu'à dire que les évêques ne défenderont jamais, d'un même mouvement, une erreur qu'ils présenteraient comme une doctrine de foi. Mais l'Église n'enseigne pas qu'il soit impossible que presque tout l'épiscopat adhère à un antipape (notons que le Pape Paul IV a enseigné que tous les cardinaux pouvaient adhérer à un faux pontife ; or les cardinaux à eux seuls sont plus importants que tout le reste de l'épiscopat).
Suite à la crise de l'Église, la particularité est que les évêques ont été trompés petit à petit. Ils ont cru que les élections étaient régulières, ils ne comprenaient pas la situation. Cela dit, je reconnais tout à fait que la situation actuelle est particulièrement surprenante, et je ne prétends pas donner d'explication théologique exhaustive ni parfaite permettant de l'expliquer, contrairement à ce que font les sédévacantistes !
Car en soi, j'avoue qu'il est étonnant que presque tout l'épiscopat ait adhéré à de faux pontifes ; mais en même temps la foi nous enseigne qu'ils ne peuvent pas être papes, et l'une des meilleures preuves - je dirais la moins contestable - est celle des "canonisations", auxquelles on pourrait ajouter la nouvelle messe et les rencontres interreligieuses. Vu les personnes que les prétendus "papes" du Vatican ont prétendu canoniser, il est impossible que les "artisans" de ces canonisations soient des papes légitimes ; et si vous dites le contraire, je vois mal comment vous pouvez encore avoir la foi catholique. Le cas très récent de Mère Thérèsa en est une illustration évidente.
Je suis d'accord sur le fait qu'il ne suffit pas d'expliquer que le Vatican actuel ne peut pas être la véritable Église : il s'agit également de démontrer où est la vraie Église (ce que ne font pas les sédévacantistes). Mais sur la question de l'épiscopat adhérant à un faux pontife, je répète que d'une part l'Église n'a jamais enseigné que c'était impossible, et d'autre part il s'agit d'un problème particulièrement complexe, qui touche aux méandres du raisonnement théologique.
Sur ce point, il y a deux différences majeures entre mon attitude et celle des sédévacantistes :
1°) Eux se contentent d'arguments purement négatifs ("untel ne peut pas être pape"), ou dans le cas des guérardiens, ils inventent des théories contraires à la foi.
2°) Plusieurs de leurs arguments sont infondés : et c'est spécialement le cas lorsqu'ils contestent la légitimité de Jean XXIII et de Paul VI.
Mais à l'instant où je m'apprête à terminer mon article pour le publier, je me fais la réflexion suivante, qui est à mon avis capitale et qui explique pourquoi une telle chose a pu arriver : si presque tout l'épiscopat a adhéré à un faux pontife, c'est très vraisemblablement parce qu'il ne l'a pas fait "ensemble et d'un même mouvement" ; car comme je l'ai déjà expliqué, Wojtyla n'a probablement pas été reconnu par l'unanimité morale des évêques. D'ailleurs il régnait une confusion formidable à cette époque, beaucoup de fidèles et d'écclésiastiques ne savaient plus que penser, et bon nombre d'entre eux n'ont obéi que par défaut. Le défaut d'adhésion universelle des fidèles, je l'ai déjà dit, semble justement indiquer qu'un nombre notable d'évêques n'avaient pas accepté Wojtyla sincèrement, dans leur coeur.
À l'attention de l'un de mes deux objecteurs, je tiens à répéter que même dans les circonstances exceptionnelles, les caractères de la Constitution divine de l'Église ne peuvent être contredits, car cette Constitution divine... est divine ! L'Église est le Corps Mystique du Christ, elle n'est pas la Synagogue !