Je vous souhaite un saint et joyeux Noël. Dieu veuille que les souffrances qui s'apprêtent à fondre sur nous soient une source abondante de bénédictions, et le chemin de notre salut.
Ce temps est l'occasion pour moi d'évoquer à nouveau l'image du chapitre 12 de l'Apocalypse à propos de la naissance de l'enfant mâle. Comme je l'ai déjà expliqué, les premiers Pères et ceux qui ont connu les disciples de l'apôtre Saint Jean enseignaient que la femme du chapitre 12 était une figure de l'Église ; seuls les Pères plus tardifs se sont focalisés sur la Très Sainte Vierge Marie. Évidemment, la Vierge étant Mère du Christ, elle est aussi la Mère de l'Église, conformément à la proclamation du Pape Paul VI lors de la clôture du concile Vatican II : car le Christ est le Corps Mystique du Christ ; donc en donnant naissance au Christ la Très Sainte Vierge a également donné naissance à l'Église, au moins dans sa nature humaine ; mais l'Église a par ailleurs une existence éternelle, à l'image du Christ dans sa nature divine.
En relisant le Père Kramer j'ai vu qu'il citait explicitement le Père Gallois comme étant le premier auteur connu à avoir émis l'hypothèse que l'enfant mâle désigne le Pape, enfanté par la femme c'est-à-dire élu par l'Église ; et le Père Kramer fait sienne cette hypothèse, la considérant comme la plus logique et la plus conforme au sens du chapitre 12. Il n'exclut pas que d'autres auteurs aient pu émettre cette idée auparavant, mais à ce jour le Père Gallois semble être le premier auteur connu à l'avoir fait ; or, étant donné que le Père Kramer était polyglotte et qu'il a dédié toute sa vie à l'étude de l'Apocalypse (lisant les meilleurs ouvrages dans de nombreuses langues), il y a de bonnes raisons de penser que le Père Gallois est l'un des premiers auteurs à avoir proposé cette hypothèse, en tout le cas le premier dont le nom soit entré dans l'histoire.
La nature divine de l'Église est décrite aux chapitres IV et V de l'Apocalypse, et sa nature humaine au chapitre XII ; mais le mérite du Père Kramer est d'avoir compris que le chapitre XII ne se contente pas de décrire l'élection du Pape de façon générale : il a en outre un sens eschatologique, car il fait partie des chapitres qui exposent l'histoire ecclésiastique. Le chapitre XII évoque l'élection d'un pape particulier durant une crise très grave, pape que l'Apocalypse prend pour modèle parce que ses vertus éminentes en feront le Souverain Pontife par excellence, probablement plus grand que Saint Pierre lui-même, l'un des plus grands saints de la Nouvelle Alliance. Ce pape est élu durant un concile œcuménique mouvementé (Vatican II), représenté sous la figure du combat des bons et des mauvais anges dans le ciel : les anges symbolisent des évêques et le ciel l'Église, conformément à la métaphore de Daniel. Dans l'Apocalypse, l'Église est figurée tantôt par l'ancien Temple juif (le centre de la théocratie), tantôt par le ciel, et tantôt par la femme. Par opposition, la Grande Prostituée est une contre-Église, et plus spécialement la fausse Église des derniers temps, qui est une parodie de la véritable Église.
Ce pape par excellence du chapitre XII est élu dans une période de troubles, disais-je, et l'image du dragon qui tente de le dévorer nous annonce les persécutions à son encontre ; puis l'image de l'Ascension nous annonce son triomphe : il est rendu au trône de Dieu, c'est-à-dire à l'Église hiérarchique (à la papauté), comme le Christ a été rendu à Son Père, triomphant de Ses ennemis. Sur ce point, je vous renvoie au chapitre IV de l'Apocalypse, où le trône de Dieu est un symbole de l'Église hiérarchique, comme le tabernacle. De même que le Temple était le centre de la théocratie juive, le tabernacle et le trône de Dieu sont le centre du nouveau Temple qu'est l'Église catholique.
La figure de l'Ascension est mon image préférée du retour de Paul VI dans l'Apocalypse, et je remercie Dieu de m'avoir fait la grâce de la comprendre, comme je le remercie d'avoir fait comprendre au Père Gallois que la naissance de l'enfant mâle désignait l'enfantement spirituel du Pape par l'Église. Le Souverain Pontife tient la verge de fer, symbole de la séparation des bons et des méchants au Livre de Zacharie : c'est lui qui prononce les excommunications générales, qui sont au coeur de la narration apocalyptique.
NB : Dans l'édition groupée de mon ouvrage "La survie de Paul VI : une certitude de foi", j'ai commis une faute d'étourderie en écrivant que le chapitre IV décrivait la nature humaine de l'Église ; or je voulais bien évidemment dire le contraire : ce chapitre décrit la Constitution divine de l'Église. Cette erreur existait déjà dans mon livre sur l'Apocalypse, et je l'avais corrigée ; seulement j'avais oublié d'appliquer cette correction à l'édition groupée.