Suite à mon dernier article Laurent Morlier a publié un commentaire où il m'adresse une objection qui n'est pas ridicule, et qui mérite donc une réponse : "comment pouvez-vous dire que l'Église enseignante perdure dans la Fraternité Saint Pie X, et qu'en même temps cette dernière a une position gallicane, et commet diverses erreurs notables ?" (on peut formuler sa question ainsi).
Je réponds que lorsque j'ai qualifié de "gallicane" la position théologique de la Fraternité, je ne parlais évidemment pas au sens strict : chacun sait que Mgr Fellay et les autres évêques lefebvristes ne sont pas gallicans, et qu'ils n'appartiennent pas à cette secte schismatique. Je voulais simplement dire que la position de la Fraternité n'est pas pleinement conforme à la doctrine catholique.
Mais ce que m'oppose ici Laurent Morlier, c'est la doctrine de l'infaillibilité des évêques dans leur enseignement moralement unanime (même en l'absence de pape) ; or il est aisé de lui répondre qu'aujourd'hui, d'une part le Pape Paul VI est toujours vivant, et d'autre part les évêques possédant une mission canonique authentique sont réduits à la portion congrue : donc les erreurs de la Fraternité Saint Pie X ne sont pas enseignées avec unanimité morale.
De surcroît, d'après l'enseignement des théologiens les évêques sont garantis contre l'hérésie (globalement, des atteintes directes au Credo), et non pas contre toute forme d'erreur ; or la Fraternité Saint Pie X ne défend pas des hérésies au sens strict. Il est permis de penser que les évêques ne peuvent enseigner unanimement des erreurs en les présentant comme des vérités de foi (j'en ai déjà parlé) ; mais là encore ce n'est pas ce que fait la Fraternité : elle propose simplement des explications à la crise actuelle. Soit dit en passant l'infaillibilité des canonisations n'a jamais été définie et ne semble pas non plus faire partie du MOU, donc à cet égard l'argument de notre objecteur n'est pas sérieux (ce qui ne signifie pas pour autant que les canonisations soient faillibles, évidemment).
On voit que l'objection de Laurent Morlier, qui pourrait sembler ardue au profane, est très facile à résoudre.
Si l'ami breton entend continuer à dénigrer mes travaux en tentant de les faire passer pour de la théologie improvisée, je serai toujours là pour les défendre, comme il se doit !
Laurent Morlier prétend que mes lecteurs savent très bien que mes propos ne sont pas sérieux, mais si c'était le cas je n'aurais pas 56 abonnés. La réalité, c'est qu'il n'a pas d'arguments à m'opposer. Il continue de prétendre que la Fraternité Saint Pie X reconnaît Bergoglio comme pape, mais je vous donnerai prochainement une illustration évidente du fait qu'elle ne le reconnaît pas du tout, si l'on s'en tient aux exigences de la doctrine catholique quant à l'adhésion au Pontife Romain.
Laurent Morlier a beau jeu d'essayer de me réfuter, mais selon mes informations il n'a que le bac, tandis que j'ai un master de droit : ce qui signifie que j'ai plus étudié les matières juridiques qu'un prêtre qui sort du séminaire, puisque les prêtres ne sont pas spécialisés en droit. D'ailleurs, les prêtres de la Fraternité Saint Pie X (et les sédévacantistes) ont des séminaires improvisés, sans professeurs qualifiés en droit canonique : c'est notamment la raison pour laquelle, jusqu'à ce que j'aborde le problème de la Bulle de Paul IV, à ma connaissance aucun prêtre traditionaliste n'avait encore prouvé que cette bulle évoquait la cérémonie d'obédience des cardinaux, et non pas l'acceptation pacifique. C'est également la raison pour laquelle très peu de prêtres traditionalistes comprennent que la survie de Paul VI est une certitude de foi, partant qu'elle seule permet de sauvegarder les caractères de la Constitution divine de l'Église.
L.M. me reproche une attitude d' "approximation" (ce que je récuse), tout en se faisant lui-même le champion de l'approximation, notamment lorsqu'il écrit, cette fois dans le domaine de la théologie morale, que mon frère a révélé les péchés de Mel Gibson, commettant donc un péché de médisance ; or la médisance concerne la révélation de péchés cachés, et non pas de péchés publics ! Les théologiens enseignent que lorsque les péchés en question sont déjà connus d'un grand nombre de personnes (ce qui est le cas ici), on ne commet aucun mal en les évoquant. D'autant plus qu'en l'occurrence il s'agit de les dénoncer, comme l'a fait St. Jean-Baptiste avec l'adultère d'Hérode.
Je conclurai en disant une dernière chose : ce que Laurent Morlier ne comprend pas quand il tente de réfuter ma thèse sur la mission canonique de la Fraternité Saint Pie X, c'est qu'il n'est pas exigé que la Fraternité reconnaisse explicitement Paul VI pour qu'elle bénéficie de cette mission ; il suffit qu'elle l'ait déjà reconnu, sans avoir adhéré à une autre obédience depuis ; or c'est très exactement le cas : Paul VI est le dernier pape accepté pacifiquement et universellement par l'Église, et spécialement par la Fraternité Saint Pie X (puisque les modernistes, eux, ont adhéré à de faux pontifes). Donc le lien canonique perdure.
Si vous prétendez que la Fraternité a reconnu Wojtyla et ses successeurs (comme le fait Laurent Morlier), alors vous prétendez que ces faux pontifes ont été acceptés avec unanimité morale : puisque la partie la plus saine de l'Église les aurait reconnus (et les sédévacantistes, eux, furent une minorité insignifiante). Mais c'est toute l'erreur de notre ami breton, étant donné qu'il affirme qu'en apparence, Wojtyla et ses successeurs ont été acceptés pacifiquement et universellement ; or cela est impossible, comme je l'ai déjà prouvé.
On ne s'improvise pas juriste...