Je viens de recevoir un message d'une dénommée "Fatima" qui me maudit et me reproche de juger les autres. J'ignore si l'intéressée est musulmane, mais pour l'anecdote, au cas où vous l'ignoreriez, Mahomet est mort en prononçant des paroles de malédiction (à l'encontre des juifs et des chrétiens), tandis que le Christ est mort en prononçant des paroles de bénédiction ("Père, pardonnez-leur, parce qu'ils ne savent pas ce qu'ils font").
En vérité, le fait de me reprocher de juger les autres tout en me maudissant, c'est une contradiction majeure : la malédiction est un péché grave qui consiste à souhaiter le mal à son prochain et à présupposer de sa destinée éternelle, usurpant de ce fait le jugement de Dieu.
Dénoncer le mal n'équivaut pas à maudire son frère. Lorsque j'ai rédigé mon dernier article sur la mort des deux militaires, en mentionnant leur mauvaise vie, je ne les ai pas maudits. Evidemment, certains pourraient m'objecter que je devrais me contenter de dénoncer le mal de façon abstraite, sans viser personne en particulier ; sauf qu'il y aurait là un aspect totalement désincarné. Il est de notre devoir, à nous, chrétiens, de nous opposer au vice, de fustiger les moeurs contemporaines, y compris lorsqu'il est question d'individus spécifiques.
Je vous donne un exemple : un jour, un membre de ma famille me disait à propos de jeunes de mon âge "c'est des gens biens, ils ont une bonne situation, ils sont bien habillés". Je lui ai répondu fermement, avec une ardeur un peu sauvage (mon saint patron avait lui aussi un tempérament ardent), en disant : "Quoi, des gens biens ? Sais-tu combien il y a de gens biens aujourd'hui ? Ils vivent presque tous dans la fornication, comme des chiens. Ils n'ont aucune dignité, aucun amour du bien ni de la vérité. Tu ne sais même pas comment ils vivent, et tu les appelles des gens biens !"
Je vous donne un second exemple : on m'a souvent reproché de dénoncer avec véhémence l'immodestie des tenues des femmes dans notre société pervertie et impudique ; or c'est par amour que je le fais ! Cela me blesse d'autant plus quand il s'agit de soeurs dans la foi, de filles "tradis". Et assurément, j'en ferai la croisade de ma vie ! Précisément par amour de ce que la femme devrait être : une mère, et non pas une séductrice ; un vase pur qui donne une génération sainte à Dieu. Si, par vanité, l'immodestie vestimentaire vous tente et fait chanter ses sirènes à vos oreilles, n'oubliez jamais ça : entre la séductrice et l'avorteuse, il n'y a qu'une pelure d'oignon. Pour ma part, chez une femme je n'estime rien autant que la pudeur ; et il me plaît davantage de la voir en jupe longue, pleine de dignité, que de la voir avec des tenues sensuelles qui font honte à Dieu, aux anges et aux saints. C'est une pitié et une grande tristesse de voir que même chez nous la pudeur disparaît.
Lorsque je songe aux dernières paroles que je prononcerai avant de mourir, ce sont les suivantes qui me viennent à l'esprit : "Béni soit le nom du Seigneur !"
Un chrétien doit bénir son Dieu et son prochain, ce qui ne l'empêche pas de combattre le mal et de le dénoncer. Pour ma part, je ne maudirai donc pas Fatima, mais je lui souhaiterai le repentir et la conversion dans la vraie foi.
Dernière chose, Fatima qualifie ma vie de "misérable". Si elle me connaît, peut-être est-ce une allusion au fait que je suis un fantôme aux yeux des autres, une sorte de lépreux.
À cela je répondrais deux choses :
1. Dieu ne nous juge pas d'après l'opinion des hommes ; au jugement particulier, sa Sagesse éternelle n'aura que faire de l'approbation des foules ; nous serons seuls face à Lui, et nous n'emporterons dans la tombe ni notre épouse, ni nos parents, ni nos amis. De surcroît les Saintes Écritures disent en de nombreux endroits que l'estime des hommes est sans valeur : "Malheur à vous quand tout le monde dira du bien de vous ! C'est bien de cette manière que leurs pères traitaient les faux prophètes" (Luc VI.26) ; "Si le monde vous hait, sachez qu'il m'a haï le premier. Si vous étiez du monde, le monde aimerait ce qui lui appartiendrait en propre ; mais parce que vous n'êtes pas du monde, et que je vous ai choisis du milieu du monde, à cause de cela le monde vous hait." (Jean XV.18-19). De même le diable est appelé "prince de ce monde", parce que la plupart des hommes lui appartiennent ; et ces derniers aiment ceux qui font partie, avec eux, des futurs damnés. Par conséquent, il n'y a pas de plus grand signe de prédestination que le mépris des autres ; et si j'ai été constamment impopulaire durant ma vie, ce sera mon honneur et ma gloire au ciel.
(Pendant que j'écris cela, j'entends les rires de mes pairs dehors ; et moi je suis tranquille avec Dieu).
2. Nous avons tous une vie misérable ici-bas :
"Nos jours s'élèvent à soixante-dix ans,
et dans leur pleine mesure à quatre-vingts ans ;
et leur splendeur n'est que peine et misère,
car ils passent vite, et nous nous envolons !"
(Psaume 90)
J'aimerais mourir pour avoir dénoncé le vice, comme Saint Jean-Baptiste, décapité par les soldats d'Hérode pendant que les dépravés du palais se livraient à leurs viles réjouissances.
Béni soit le nom du Seigneur !