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In Nomine Domini

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« Je suis venu dans le monde pour rendre témoignage à la vérité » (Jean XVIII. 37)


Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)

Publié par Jean-Baptiste sur 3 Juin 2021, 07:25am

 

Note préliminaire :

Les propos que vous allez lire ne sont pas une attaque personnelle contre les sédévacantistes, ni contre la Fraternité Saint Pie X : il s'agit d'une critique à l'encontre de certaines de leurs positions théologiques (en l'occurrence surtout celles des sédévacantistes). Je me vois obligé de le préciser à chaque fois, parce que certains l'interprètent comme une attaque, surtout ceux qui ont passé toute leur vie dans ces milieux là. En tant que catholiques, nous ne sommes pas une secte, qui doit suivre tout ce que dit le gourou : premièrement les prêtres ne sont pas membres de l'Eglise enseignante (donc ils n'ont aucune autorité pour définir la doctrine catholique) ; deuxièmement, en dehors du dogme il y a les opinions libres (un domaine assez vaste) ; et troisièmement, dans la situation actuelle il règne une telle confusion que très peu de catholiques (clercs ou laïcs) ont des idées claires sur la théologie dogmatique et la Constitution Divine de l'Église.

 

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Récemment, un article de catholicapedia reproche à l'abbé Sélégny (FSSPX) de dire que "Vatican II ne contient pas d'hérésies" ; or, une fois de plus, les sédévacantistes ne comprennent pas qu'il est impossible que tout le corps hiérarchique épiscopal enseigne l'hérésie avec unanimité morale (même en l'absence de pape, soit dit en passant !).

 

L'abbé Sélégny durant sa conférence, d'où "catholicapedia" tire ses citations

 

L'abbé Sélégny fait valoir que Mgr Lefebvre a signé, or il n'aurait pas signé des hérésies. Quel argument ! Le critère de l'abbé Sélégny, ça n'est pas l'Eglise, l'indéfectibilité et l'infaillibilité du corps épiscopal uni ; son critère, c'est Mgr Lefebvre, et sa supposée infaillibilité personnelle : le pape de la tradition en somme !

Même si je suis d'accord avec l'abbé Sélégny sur la conclusion (Vatican II ne peut pas contenir d'hérésies), je suis évidemment en désaccord avec les prémisses : Mgr Lefebvre n'est pas constitutif de l'infaillibilité de l'Église, ça n'est pas sa présence au concile Vatican II qui a constitué une garantie contre l'hérésie ! Certains prêtres de la Fraternité Saint Pie X substituent Mgr Lefebvre à l'autorité de l'Église, comme ces protestants ou autres acéphales qui invoquent l'autorité du fondateur de leur secte. Nous sommes catholiques, nous ne sommes pas luthériens.

Autre remarque : l'abbé Sélégny conseille à ses fidèles de "laisser la théologie aux théologiens" ; le problème c'est qu'il n'y a plus vraiment de théologiens aujourd'hui. Étant donné qu'il n'existe plus de vraies universités catholiques et que nos prêtres sont formés dans des séminaires improvisés, ils sortent de leur formation sans qualification officielle, sans diplôme. Un jour un prêtre m'a dit que je n'avais pas de qualification ; je lui ai répondu que dans la situation actuelle de l'Église, les prêtres comme lui sortaient tous de séminaires dont les professeurs n'ont pas été nommés par l'Église, et que c'était lui qui n'avait pas de qualification. Moi j'ai un master de droit (le diplôme le plus proche de la théologie), je suis juriste de formation, je suis sorti deuxième de ma promotion, j'ai une qualification officielle ; un prêtre d'aujourd'hui n'a pas de vraie qualification parce qu'il sort d'un séminaire improvisé (ou pire, moderniste), sans professeurs nommés par l'Eglise...

Mes propos sont un peu provocateurs mais ils sont surtout destinés à montrer qu'il faut éviter les arguments d'autorité : c'est comme si moi, je disais que je sais tout sur le droit, et que les profanes du droit ne peuvent rien m'apprendre. Jamais ne j'aurais cet orgueil là. On peut m'accuser d'orgueil (on l'a déjà fait) mais je me garderais bien de cette attitude. En réalité les disciplines juridiques sont tellement nombreuses, ce domaine tellement vaste, que je ne peux pas le connaître totalement ; et donc un profane du droit peut très bien avoir une meilleure connaissance de certaines disciplines que moi...

NB : Il existe des ouvrages religieux écrits par des laïcs très savants : ainsi du traité sur l'élection du pape, de Jérôme Bignon.

Comme je parle anglais, j'ai pu lire par exemple des manuels de théologie dans cette langue, que les prêtres français n'ont que rarement lus : ils viennent très souvent de familles de la tradition, et sont passés par des écoles religieuses où l'apprentissage de l'anglais est très faible voire inexistant.

Plusieurs sédévacantistes commettent  effectivement des erreurs énormes typiques de gens qui s'improvisent théologiens, mais certaines erreurs des prêtres de la Fraternité sont plus ou moins aussi sérieuses :

- Quand il y a eu la pseudo canonisation de Wojtyla, la Fraternité a publié un dossier pour tenter de résoudre le dilemme, en avançant deux arguments complètement erronés : 1°) la procédure a changé donc les canonisations ne sont plus infaillibles ; 2°) il s'agit d'une fausse notion de la sainteté. Il faut répondre que premièrement ce n'est pas la procédure qui rend une décision infaillible (erreur semblable à celle des gallicans et des jansénistes), et deuxièmement en invoquant le changement de définition de la sainteté on ne fait que déplacer le problème, car cela revient à prétendre que l'Église enseigne à tous les chrétiens une fausse notion de la sainteté. Comme le dit l'encyclopédie catholique américaine de 1907, c'est improprement qu'on parle de "canonisations" pour évoquer les décrets des évêques de jadis qui proposaient certains défunts à la vénération des fidèles ; les canonisations proprement dites sont "la prérogative du pape, par laquelle le Pontife Romain ordonne à l'Église universelle de vénérer publiquement un individu". Par conséquent, ce qui rend la canonisation infaillible, c'est le fait qu'elle émane du pape, et qu'elle présente le caractère d'une discipline universelle. L'argument de la Fraternité Saint Pie X consiste à dire que la définition de la sainteté est changeante dans l'Eglise moderniste ; mais quand l'Eglise moderniste "canonise" Wojtyla, elle ne considère pas cet acte comme un décret révocable : les fidèles sont censés le vénérer à perpétuité ! D'ailleurs vous noterez que le Vatican n'a encore pas osé "décanoniser" Saint Louis (accusé d' "antisémitisme") ou d'autres saints. Je veux dire par là qu'à partir du moment où vous pensez que Ratzinger et Bergoglio sont de vrais papes (ce qui n'est pas mon cas), vous êtes censés croire que ceux qu'ils "canonisent" sont des saints ! L'argumentation de la Fraternité à cet égard n'est pas plus valable que celle des sédévacantistes sur d'autres sujets.

- L'abbé Sélégny, dans sa conférence, dit que l'exhortation Amoris Laetitia "ne contient pas d'hérésies" ; or il oublie que même en l'absence d'infaillibilité, les actes du magistère dits "authentique" ne peuvent pas "tromper gravement les fidèles", que ce soit en matière de foi ou en matière de morale. À cet égard l'exhortation Amoris Laetitia est beaucoup plus problématique que le concile Vatican II, car, là où l'on ne peut pas dire que le concile trompe gravement les fidèles (en ce sens que malgré ses enseignements erronés, il ne les fait pas changer de religion ou ne leur enseigne pas des immoralités), en revanche l'exhortation Amoris Laetitia a affirmé que les adultères publics pouvaient recevoir la Communion, et Bergoglio a confirmé l'exactitude de cette interprétation dans sa lettre aux évêques argentins, qui a été intégrée aux actes officiels du Saint Siège, et donc au "magistère" de l'Eglise moderniste. Or l'infaillibilité AU SENS LARGE, que le cardinal Franzelin appelait "sécurité infaillible" exclut qu'un enseignement même non-infaillible au sens étroit et strict du terme trompe gravement les fidèles. Comme le dit une thèse de doctorat de 2016, de Lawrence Jerome King, lorsque des catholiques adhèrent aux enseignements non-infaillibles, "bien qu'ils n'aient pas de certitude absolue que l'enseignement soit vrai, ils peuvent être certains qu'en y adhérant, ils ne mettront pas en péril leur âme".  A cet égard il est évident que si vous adhérez à la lettre de Bergoglio aux évêques argentins, vous mettez en péril votre âme : parce que vous pensez que des adultères publics, des pécheurs, peuvent communier et donc participer à la grâce ; et que vous-même, si vous vivez dans le péché, vous pouvez communier (en réalité, boire votre condamnation !).

Je me contenterai de ces deux exemples (les plus clairs) mais on pourrait en ajouter d'autres...

NB : À ma connaissance la Fraternité n'a pas fait de dossier sur le problème d'Amoris Laetitia et en particulier de la lettre aux évêques argentins, en tout cas pas de dossier comparable à celui publié sur les "canonisations" ; or le problème est encore plus grave, ou au moins aussi grave.

 

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Ces dernières années, un laïc sédévacantiste, Adrien Abauzit, avocat de profession, publie des livres où il reprend les vieilles erreurs des autres sédévacantistes qui ont écrit avant lui, d'une manière aussi caricaturale, très éloignée de ce que je peux voir sur des forums tels que "cathinfo", où plusieurs sédévacantistes admettent les problèmes évidents que posent leur position théologique, et font des erreurs beaucoup moins grossières. C'est dommage, surtout pour un juriste de formation : il a beau être avocat, il n'a pas du tout la même rigueur juridique que moi.

Voici un échange que j'ai eu avec lui sur facebook :

(cliquez sur les images si vous souhaitez agrandir)

 

Au départ c'est "Caleana Major", une jeune femme de nos milieux, qui fait sa publicité ; c'est là que j'interviens.

Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)
Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)
Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)
Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)

Notes :

1°) Ce ne sont pas "des évêques" qui se trouvaient à Vatican II, mais tout le corps épiscopal. La formule d'Adrien Abauzit en dit long, elle exprime bien son malaise sur cette question, il sait au fond que sa position est intenable, car le corps épiscopal ne peut pas enseigner l'hérésie avec unanimité morale ; or les évêques ont presque tous signé, même Mgr Lefebvre : l'unanimité morale est caractérisée. Donc le concile Vatican II ne peut pas contenir des hérésies à proprement parler, mais tout au plus des enseignements erronés : la Fraternité Saint Pie X a raison sur ce point, et ce sont les sédévacantistes qui ne savent pas de quoi ils parlent...

2° ) La doctrine de l'acceptation pacifique est bien enseignée par le Concile de Constance à travers la condamnation des erreurs de Jean Huss et Wycliff, comme l'explique le Père Smith dans son ouvrage de 1896, Dr Littledale's Theory of the Disappearance of the Papacy. Elle est également enseignée par le magistère ordinaire universel, notamment les théologiens suivants :

Cicognani (Canon Law, 1947) ;

Le cardinal Billot (De Ecclesia Christi, Quaest. XIV Th. 29, § 3) ;

Le Père Smith (Dr Littledale's Theory of the Disappearance of the Papacy, 1896) ;

Le Père Connell (American Ecclesiastical Review, 1965) ;

Ferraris, qui était le lexicographe de l'Église de Rome, donc un théologien de renom ;

Sylvester Joseph Hunter (Outlines of Dogmatic Theology, 1896) ;

Le cardinal Journet (L'Église du Verbe Incarné) ;

Dom Guéranger (L'anné liturgique, Vol XII, p.188)  ;

Ludwig Ott (Fundamentals of Catholic Dogma, 8-9; 299, 1953) ;

Wernz-Vidal (Jus can., II, p. 437, note 170) ;

Saint Alphonse de Liguori (Verità della fede, in Opere…, vol. VIII, p. 720, n° 9).

Voir mon article complet sur la question.

 

3°) La Bulle du Pape Paul IV n'a jamais enseigné les sottises dont parle Adrien Abauzit, et qui ne sont qu'une réitération des erreurs du club de Louis-Hubert Rémy et des autres sédévacantistes : comme je l'ai démontré il y a déjà plusieurs années dans mon ouvrage de 2015, la Bulle évoque la cérémonie d'obédience des cardinaux dans la chapelle sixtine, après l'élection du Pape : "la prestation d'obéissance rendue à lui par tous", en latin praestitam ab omnibus obedientiam. Adrien Abauzit est juriste et ne se rend pas compte que cette formule : "par tous" est typiquement une formule de style juridique faisant allusion aux personnes précédemment nommées dans le paragraphe de la Bulle, en l'occurrence les cardinaux qui prêtent serment au Pape et lui font hommage. En d'autres termes la Bulle ne parle pas du tout de l'acceptation pacifique, elle parle de la cérémonie d'obédience des cardinaux ; elle ne dit pas qu'un élu hérétique du conclave puisse être reconnu par toute l'Eglise (!), elle dit qu'il peut l'être par tous les cardinaux !

Combien de fois aie-je écrit contre cette erreur, sans jamais voir un seul sédévacantiste me réfuter !

Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)
Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)

 

Je cite cette phrase clé de mon propos :

"Vous êtes en train de dire que l'Église est faillible en période de vacance pontificale, ce qui est une hérésie".

 

Pour l'abbé Ricossa par exemple, l'Église est faillible durant la vacance pontificale, je le cite dans mon livre de 2015 !

 

Les sédévacantistes accusent les modernistes d'hérésie, et ils écrivent des choses encore pires, en tout cas bien pires que ce que l'on trouve dans les textes du Concile !

Est-ce que les modernistes ont écrit dans le Concile que l'Église était faillible durant les vacances pontificales ? Est-ce qu'il y a dans le Concile une hérésie contre la Constitution Divine ?

😂 🤣

Les erreurs des sédévacantistes (bis repetita)

 

Dernier rappel & objection irréfutable contre le sédévacantisme :

 

En vertu de la doctrine de la perpétuité de la succession apostolique, si le Siège était vacant, l'Église aurait depuis longtemps travaillé à élire un pape. Or aucun effort de ce type n'est visible aujourd'hui.

 

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Je conclurai mon article sur cette anecdote : un fidèle m'a raconté qu'une de ses connaissances se trouvait un jour avec un prêtre sédévacantiste à Paris, et ce laïc était passioné par la liturgie ; il a dit au prêtre : "dans cette rue Monsieur l'Abbé, il faut célébrer telle messe aujourd'hui, parce qu'il y a un décret spécifique à cette rue pour ce jour du calendrier",etc. Le prêtre en question était tellement orgueilleux que malgré les très bonnes connaissances de ce laïc (dues à son intérêt pour le sujet), il a refusé de tenir compte de son conseil et a célébré une messe qui ne convenait pas. Je connais un prêtre, converti de l'Église moderniste, qui n'aurait pas du tout réagi de cette manière.

L'orgueil sacerdotal fait commettre des erreurs, et ce n'est pas parce que quelqu'un est prêtre qu'il sait tout, qu'il a raison sur tout, qu'il faut adhérer à tout ce qu'il dit.

Des prêtres qui croient qu'ils savent tout, j'en ai déjà croisé chez les sédévacantistes, j'en ai déjà croisé un dans la Fraternité aussi, cependant qu'il était de passage là où j'assiste à la Messe....

Les clercs s'égarent, les laïcs s'égarent, parce que, comme le disait Salomon :

"Le nombre des insensés est infini"

"Entre mille homme, j'ai trouvé un seul sage"

Très peu d'hommes ont la sagesse...

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